Les traces du présent

  • "Regarde petit !" Le vieil homme se pencha et montra du doigt la carotte de pierre à son petit-fils:
  • "Tu vois, chaque année, chaque siècle de la Terre laisse une trace dans l'histoire, une trace qui reste inscrite à tout jamais dans la terre elle-même. On peut remonter ainsi presque jusqu'à l'origine du monde..." Le petit garçon observa les cercles concentriques avec intérêt, et ses yeux s'écarquillèrent devant le large cercle totalement noir qui faisait immédiatement penser à une infection bactérienne, le pourissement d'un membre par la gangrène, aux trois quarts du cyclindre.
  • "Et ça, c'est quoi ?" Une moue triste assombrit les traits du vieillard.
  • "Ah, ça ! C'est une sombre période de notre histoire, qui s'appelle la "société de consommation", du vingtième au vingt-deuxième siècle où les hommes brûlaient tout ce que la nature produisait sans raison majeure, juste pour satisfaire leurs désirs illimités de posséder tout ce qu'il était possible d'avoir. Sans aucune limite, sans raison, et bien sûr au détriment des autres. C'était un combat sans fin entre les hommes mais aussi entre l'humanité et la nature, motivé par la seule avidité. Ils ont fini par presque tout détruire: la Terre, les animaux, les plantes, la vie. Heureusement, la nature a su lentement se remettre, et nous sommes ici aujourd'hui. Mais c'est une leçon à retenir, mon garçon: cette période est une honte absolue qu'il nous faudra supporter et réparer pendant encore bien longtemps..." Le garçon regarda avec haine ces cercles noirs, en se promettant de toujours renier ces cloportes, ces rapaces avides et sans limites qui se disaient être ses ancêtres.