Novatore est un rappeur underground basé dans l’Illinois (USA). Avant Alchemy and Black Magic, son nouvel album sorti le 4 août, mon intérêt pour sa musique était relatif, pour ne pas dire assez faible. J’écoutais bien sûr chacune de ses nouvelles productions mais sans vraiment accrocher à l’ensemble d’entre elles. Si d’anciens titres comme « 4 Down », « Ruckus » et quelques autres happaient déjà bien ma matière grise, plus que bien même, il arrivait parfois que je ne pouvais pas terminer l’écoute de certains albums du MC. Par lassitude, par « pinaillage » (trop de ceci, pas assez de cela), bref, à cause de tous ses petits défauts qui parasitaient mon audition. Mais je gardais tout de même l’espoir d’entendre un ou jour l’autre L’ALBUM qui me ferait vraiment kiffer la musique de Novatore de A à Z, car je sentais chez lui comme un gros potentiel artistique à l’état latent, en perpétuelles exploration et évolution. Et avec Alchemy and Black Magic, c’est ce qui s’est produit. Dès sa première écoute, j’étais épaté et me disais : « Enfin ! Ça y est ! C’est THE SKEUD ! », tout en étant déjà confiant pour son prochain album et impatient de pouvoir l’écouter.
Pour décrire rapidement Alchemy and Black Magic, il comprend onze titres et dépasse à peine les trente minutes. Des morceaux assez courts donc (ce qui rend l’opus aussi efficace que facile d’audition), et qui s’inscrivent plutôt dans le registre du hip-hop « boom bap » aux antipodes du trap metal et dérivés.
L’ambiance générale de l’album est assez contrastée et possède comme un fil conducteur plus ou moins apparent. Les morceaux passent ainsi d’atmosphères plutôt feutrées à d’autres plus sombres, ou plus cotonneuses, ou plus vigoureuses, le tout en étant comme liés par une sorte de souci d’homogénéité. Quelques pistes sont assez touchantes d’émotions par ses mélodies, et d’autres sont plus « dansantes » comme « Suicide Choir » et « Self Destruct », où les snares et bass kicks claquent peut-être davantage. D’autres encore proposent une poignée de nappes de sons presque chill, un peu « à la Budamunk ». Et la dernière, « Spell caster », invite pour sa part à la rêverie, à la féerie teintée d’espérance lorsque certaines la précédant, plus typées « horror core », réveillent des sentiments mêlés d’angoisse, de tristesse légère penchant vers l’obscurité, mais vers une obscurité qui se veut plutôt rassurante.
En ce qui concerne le chant de Novatore, son timbre n’est jamais très agressif, mais pas plaintif pour autant. Son « flow » assez « sec » est plus fluide, plus abouti que sur ses disques antérieurs. Sur ce nouvel album, il s’est encore entouré de MCs plus ou moins notables, plus ou moins underground comme Lord Goat, A.M. Early Morning, ou de pontes du hip-hop comme Ill Bill. Et côté lyrics, les thématiques lui sont personnelles et intimes : introspections dans sa vie quotidienne de rappeur, d’artiste-bourreau de travail ; réflexions sur les contraintes comme sources de motivation, sur la patience, l’échec, l’addiction, la noirceur du monde, etc. Tout cela entre quelques punchlines sarcastiques, ou contre les donneurs de leçons quiétistes, possédant de belles grandes idées mais qui agissent peu voire jamais.
Si je ne m’étends pas plus sur les paroles c’est parce que je ne suis pas totalement sûr d’en avoir compris toutes les subtilités, les « privates jokes », et parce que je n’ai pas eu accès à l’intégralité des textes. Puis j’écoute parfois du rap comme n’importe quel genre de musique, avec « l’âme d’un progueux/musicien ». C’est-à-dire en étant beaucoup plus attentif et réceptif aux ambiances pouvant transporter « le corps et l’esprit », aux émotions que des harmonies provoquent, aux modes de composition, à la construction rythmique et mélodique des parties chantées plutôt qu’à leur contenu verbal, même lorsqu’il s’agit de « musiques à textes ». On est apatride des conventions musicales même en matière d’audition ou on ne l’est pas comme disait un certain chroniqueur…
Pour finir, Alchemy and Black Magic est un bien bon album — le onzième du rappeur. Sa qualité est suffisamment remarquable pour que je l’apprécie dans son intégralité sans jamais m’ennuyer. C’est simple : ce nouvel opus tourne quasi en boucle depuis qu’il est sorti et ce j’espère encore pour longtemps !
En attendant que Novatore fasse une tournée européenne (certains en rêvent !), on peut écouter ou commander son « dernier bébé » et les précédents sur Bandcamp et sur son site officiel.
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