Pendant des années, j'avais la forte impression que je n'avais personne sur qui compter au sein de ma famille, notamment pour parler de mes problèmes liés ou non aux soucis familiaux, dont la gravité variait, ou bien pour surmonter les moments difficiles. Bien sûr avoir du soutien extérieur est important. Seulement j'ai toujours souffert du manque de ce soutien au cœur même du vacarme familial.
Ce soutien à l'intérieur de cette famille, il est parfois vital dans certaines situations. Selon tout ce que l'on a pu affronter, notre état de santé physique ou mental, nos idées, notre sensibilité il peut aisément être quelque chose d'essentiel. Pour moi ce fut et c'est toujours le cas. Ce soutien interne m'a permis plusieurs choses: de ne pas me sentir seule, de pouvoir compter sur une personne quand je ne parvenais pas à effectuer des tâches ménagères par exemple à cause de mes douleurs et de ma fatigue chroniques. Il m'a aidé, conseillé, épaulé quand ça n'allait pas, m'a défendu quand la situation était injuste, ou quand il y avait des abus. Ce soutien est omniprésent aujourd'hui, et sans lui je n'aurais pas survécu je pense. Ma famille est toxique pour de multiples raisons. Quand je dis toxique, je précise qu'il peut s'agir de comportements conscients ou inconscients, volontaires ou involontaires. Certaines personnes ne peuvent se rendre compte de tout le mal qu'elles peuvent faire avec des mots, des gestes, des actes, et le manque de communication, ou la difficulté à communiquer, n'arrangent pas les choses. En revanche ça ne les excuse pas pour autant.
J'ai mis plusieurs années avant de parler de mes soucis à mon unique soutien intra-familial. Et je pense que ce n'est pas seulement lié à la toxicité de ma famille, mais également à mon éducation. Assignée fille, j'ai été éduquée comme telle. On sait déjà (car on a beaucoup de ressources à ce sujet) que l'on est éduqué-e selon notre genre assigné. La culture dans laquelle je suis née et l'histoire de ma famille ont eu aussi une incidence sur mon éducation, seulement ce n'est pas le cœur du sujet. Ainsi j'avais pour ordre, en tant que fille, de ne jamais me plaindre, de répondre oui passivement à mes parents, et de les servir. De correspondre au modèle qu'iels ont de la fille parfaite, de bien travailler et d'être toujours active dans le foyer familial (tiens, ça pue le patriarcat tout ça). Et surtout: de refouler mes émotions. Le refoulement de tout sentiment et de toute émotion personnelle dans cet environnement était normal, voire obligatoire. Cela a eu pour conséquence un grand manque de communication. Depuis, il m'est difficile de partager ce qui peut me faire souffrir, ou de dire ce qui m'arrive de manière générale, quelle que soit la gravité.
Cela peut être extrêmement dangereux de nourrir ce type de climat pour la simple et bonne raison que la personne souffrante ne dira pas ce qui lui arrive, et que s'il s'agit d'une situation très grave, aucune personne de son entourage pouvant l'aider ne sera au courant. Elle peut se mettre en danger ou mettre en danger d'autres personnes aussi, des fois même sans le savoir, ou encore avoir des comportements toxiques sans s'en rendre compte. C'est pour cela qu'il est primordial d'avoir un environnement propice à la communication, ou avoir au moins une personne sur qui compter, avec qui il est possible de communiquer.
La famille c'est une mini-société. Très souvent l'on verra qu'il y a des normes qu'on nous imposera, des oppressions, des stéréotypes, de la violence, une hiérarchie, des questions de pouvoir. Chaque personne doit déjà survivre dans la Société, aussi nauséabonde soit-elle. Cette infime partie de celle-ci peut faire énormément de dégâts, sur plusieurs plans, si l'on ne fait pas attention. Il est donc fondamental de savoir écouter les un-e-s et les autres, et d'encourager la communication. Les personnes ayant des difficultés à s'exprimer, à partager leurs craintes, leurs douleurs, je vous comprends. Vous aussi vous avez peut-être eu des grandes déceptions quand vous avez voulu faire confiance à des gens. Vous avez décidé de garder le silence parce que vous pensez que cela ne vaut pas la peine de parler, ou parce que cela vous paraît "normal". Je vous comprends. Ce sentiment de solitude, c'est l'origine même de ce blog.
Néanmoins, les personnes sur qui vous pouvez compter existent. Si vous avez la possibilité de pouvoir parler à ces personnes, sans craindre un manque cruel d'incompréhension ou de remarques désobligeantes, communiquez. Si vous ne trouvez pas les mots, cherchez un moyen de communication plus adéquat, mais n'hésitez pas à le faire et surtout, prenez autant de temps qu'il vous faudra. Si vous connaissez une personne qui souffre au sein de votre famille, mettez vos jugements de côté et écoutez. Proposez votre aide si vous la voyez en difficulté, mettez la à l'abri si vous la sentez en danger. Si vous n'osez pas agir directement, faites des actions indirectes ou demandez à une personne d'intervenir si la situation est dangereuse.
J'ai conscience que ce que je dis n'est pas nouveau. Beaucoup de personnes ont certainement déjà vécu cela. Donc si vous avez d'autres conseils n'hésitez pas à les partager.
Prenez bien soin de vous et des gens que vous aimez.
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